Pleine Valeur

La lecture du troisième livre de Manfred Mack « Pleine Valeur » et la rencontre d’une matinée d’août avec l’auteur dans le cadre des mini-rencontres de Christine Koehler, ont suffit pour faire de moi un adepte de sa nouvelle logique d’entreprise. Au lieu de s’affronter dans des combats internes devenus aussi coûteux qu’inutiles, Manfred développe le concept de co-création de valeur dans une optique de collaboration entre tous les acteurs de l’entreprise :

  • Le client …en tout bien tout honneur
  • Les actionnaires …pour rester politiquement correct
  • Les collaborateurs
  • La société civile
  • Les fournisseurs

Il s’agit bien d’un changement de logique qui amène l’entreprise à passer d’une approche « mécaniste » – recherche de la configuration idéale d’éléments constitutifs – à une vision « organique » et donc évolutive qui perçoit la « bonne santé » comme un tout (wholeness) et non une fragmentation d’éléments pris séparément. C’est le déploiement de David Bohm qui prône l’engendrement des parties par le tout (l’holomouvement).

« L’Activation » de Manfred Mack est présentée comme la libération de l’énergie humaine qui a envie d’être libérée. On se rapproche de « l’entreprise libérée » d’Isaac Getz. Cela passe par l’interactivité ou énergie intelligente des systèmes complexes, par la récursivité – une opération se construit sur les conséquences de l’opération précédente – formulation savante du « apprendre en faisant » de Jean-Christian Fauvet et de Jean-François Zobrist, par le principe de propriété émergente qui apparaît au niveau global sans être précédemment apparent chez les individus, etc.

Manfred émaille ses principes de réalisations pratiques chez ses clients, ce qui les rend vivantes et concrètes. Cette nouvelle dynamique, développée en concertation avec d’autres acteurs majeurs, comme SOL France , s’appuie sur de nombreux auteurs dont Otto Scharmer pour le rôle des leaders de « sentir et actualiser les futurs émergents ».

L’optique finale de Manfred de « se rendre mutuellement meilleurs » trouvera très certainement une résonance toute particulière auprès des adhérents et sympathisants de MOM21.

On peut facilement être  la victime de ce qu’on a voulu trop fort…

  • Vous avez voulu avoir de bons petits soldats qui exécutent sans trop se poser de question, et un jour vous vous plaignez d’être entouré de fantômes,
  • Vous avez voulu qu’on vous craigne, et vous n’avez personne pour vous dire la vérité car on pense autour de vous  que vous êtes susceptible de mal la prendre,
  • Vous avez voulu tout ramener au mesurable, et vous n’avez plus que ce qui s’achète,
  • Vous avez voulu que la moindre décision passe par vous, et vous vous retrouvez congestionné de tout ce que les gens ont peur d’arbitrer eux-mêmes,
  • Vous avez voulu vous rassurer derrière un système de reporting rigide, et vous vous retrouvez avec des processus contre-performants  qui  ne créent plus de valeur,

Vous avez voulu faire des économies en contrôlant tout et vous vous retrouvez avec des couts cachés improductifs et pénalisants.

Et si vous changiez de braquet… Lire la suite

Les prélèvements sociaux sur le travail dans l’entreprise font polémique depuis bien longtemps. Beaucoup de commerçants d’artisan et d’industriels y voient une des raisons de leur empêchement à se développer.

Ces charges représentent plus de 50% de la production. Autrement dit plus de la moitié de l’énergie investie par un acteur de l’entreprise s’exhale vers la communauté. Est ce un bien ? Est ce un mal ? Là n’est pas la question car cela dépend l’usage qu’on en fait.

Mais en réalité la question de la productivité n’est pas seulement liée à cette forme de taxation.

La question qui se pose est de savoir s’il n’existe pas des taxes cachées qui grèvent encore plus le travail et dont l’utilité peut paraître encore moins évidente.

Les coûts cachés du travail

Depuis de nombreuses années j’ai l’occasion de questionner des populations de plus en plus importantes de manager dans les groupes que j’anime. Et je pose toujours la même question : quelle proportion  de votre temps de travail passez-vous à faire produire du contrôle à vos collaborateurs et à répondre à une demande de contrôle de votre direction ?

La réponse est généralement : entre 40% (pour les plus chanceux)  et 60% (voire 70% pour les moins chanceux.)

Autrement dit, le travail de l’acteur est grevé d’une charge de contrôle qui peut dépasser dans certains cas, celle des charges sociales. Cette tendance à surcontrôler se généralise dans les groupes industriels construits sur le modèle de l’industrie du XIXième siècle.

Les entreprises industrielles les moins adaptables et les plus en difficulté sont généralement celles qui ont fait le choix de déposséder les acteurs de la responsabilité de leur action en mettant en place un système de contrôle externe à l’acteur, qui a comme fonction de compenser la déresponsabilisation de l’acteur. Cette déresponsabilisation de l’acteur ne peut tenir qu’à partir du moment où l’on fait le choix de sélectionner ces acteurs non pas sur leurs capacités à s’engager et sur leurs compétences, mais sur leur capacité de subordination.

Cette capacité à se soumettre a comme corolaire le sentiment de désengagement ou d’illégitimité à modifier son environnement de travail. C’est à cette condition que l’acteur peut accepter le poids d’un contrôle.

Quelques entreprises ont commencé à remettre en question ce modèle d’un autre temps.

Ces entreprises qui ont cessé de croire que leur efficacité résidait dans leur puissance de contrôle ont fait deux sortes d’économie :

– Une économie de charge de contrôle. Désormais le temps que les acteurs passaient à contrôler, ils le passent à produire.

– Une économie de personnel : l’entreprise se passe de la plus part des services dont la mission était de contrôler et de contrôler le contrôle. Autant de charges en moins.

S’il y a des gains de productivité à réaliser c’est surement dans cet espace de croyance au coût exorbitant pour l’acteur, mais aussi pour l’entreprise.

A coût caché, fonction cachée

La raison d’être de ces surtaxes du travail reste mystérieuse d’un point de vue d’une logique économique. Mais si l’on utilise un autre filtre de compréhension de la logique économique, on peut faire d’autres hypothèses.

Au de là de son rôle de sanction de l’acteur, comme moyen d’exercer le pouvoir sur lui, la création d’une instance de contrôle dans un espace de production a théoriquement comme fonction de favoriser la circulation de l’information et ainsi permettre de prendre les bonnes décisions. Autrement dit : si la direction d’une entreprise  veut pouvoir prendre des bonnes décisions, il lui est nécessaire de collecter les bonnes informations. Et ces informations vont être produites par le système de contrôle.

Tout est dans ce qu’on appelle « bonne information ». Si pour prendre une décision stratégique la direction d’une entreprise a besoin d’une information stratégique on peut comprendre qu’elle mette en place un système de remontée et de filtration de l’information adéquat.

Mais lorsqu’une entreprise met en place un appareillage qui se donne comme objectif de collecter toute  l’information, on peut se demander s’il n’y a pas d’enjeux cachés. Cette polarisation de l’information « vers le haut » porte un certain nombre de messages : l’acteur ne peut pas être responsable ni propriétaire  de son action. On ne peut pas lui faire confiance pour décider. Il n’est pas légitime pour cela. La légitimité de décider dépend, non pas de l’expérience issue du réel de l’action, mais du plus haut diplôme dans l’entreprise ou de la position la plus élevée dans l’organisation. Dans cette optique, est légitime celui qui  est le plus à même d’imaginer l’action grâce à la quantité de connaissances théoriques qu’il a prouvé qu’il avait acquises par son diplôme de grande école.

L’action peut aussi appartenir au propriétaire de l’entreprise qui, par sa position de propriétaire, est légitime pour prendre des décisions, quel que soit l’effet de ces décisions sur la survie de l’entreprise. La disparition de Virgin en est un exemple récent.

Ce fonctionnement repose sur deux primats qu’il pourrait être de intéressant  re-questionner.

– 1) Notre modèle économique continue à poser le prima de la légitimité de la propriété sur  la légitimité de l’expérience et de la compétence : je suis l’actionnaire majoritaire donc j’ai raison. Pour qu’une décision soit prise il faut que l’actionnaire soit d’accord, que cela passe par son filtre de compréhension. Une décision est juste parce que je suis le propriétaire. Quand le propriétaire de l’entreprise est celui qui a l’expertise technique cela peut se justifier, et encore, pas pour toutes les décisions. Mais quand le propriétaire n’est plus en prise directe avec l’activité, il y a des risques de dérive certains

– 2) Nos grands groupes industriels construits sur un modèle organisationnel très « troisième république » continuent à poser le prima de la pensée sur l’action. Pour qu’un opérationnel obtienne une décision, il faut qu’elle passe par le filtre de celui qui pense l’action. L’opérationnel passe une bonne partie de son énergie à convaincre la direction de lui donner ce qui est réellement nécessaire.

Le passage par le filtre de la pensée bloque les mécanismes de changement dans la mesure où la décision doit toujours être dans la logique du pensé de l’action. Mais si la pensée ne se laisse pas influencer par le réel de l’action, elle s’empêche de changer.

La relation pensée/action doit être  une relation d’inter-influence, comme dans n’importe quel processus de création. Un inventeur qui ferait tout pour que son invention ressemble strictement à ce qu’il a imaginer au départ irai au devant de beaucoup de difficultés. Il risque de ne pas voir son idée se réaliser. Une invention est rendue possible par le l’effet de l’imaginaire sur l’action et l’effet en retour de l’action sur l’imaginaire. Cette confrontation de logique a effet de changement mutuel est la condition de l’innovation. Le primat de l’une sur l’autre rend difficile la réalisation.  La première fonction du contrôle devrait être de fournir en retour une information qui modifie le projet d’action.

Boucle courte ou boucle longue ?

Cette fonction régulatrice de l’information est une des conditions de l’adaptabilité de l’action. Si l’acteur est légitime pour modifier son projet d’action en fonction de l’information qu’il produit, on peut imaginer qu’il va pouvoir être adaptable et efficient. Mais s’il est question de centraliser toute l’information pour laisser au chef la responsabilité de toute la décision,  il y a de grands risques de perte et de transformation de cette information. Cette perte en ligne et cette transformation va certainement faire perdre au contrôle sa fonction de régulation de l’action. Le contrôle dans sa conception centralisée ne peut avoir comme effet que le renforcement du pouvoir de la pensée sur l’action. La conséquence ne peut être qu’une incapacité du système à se réguler et à s’adapter.

Lorsque l’acteur est dépossédé de la légitimité de son autocontrôle et que le contrôle est polarisé par la direction, il perd sa fonction de source d’information à fonction de régulation de l’action.  Il devient un instrument d’exercice du pouvoir.

Plus qu’un instrument, ce processus a une fonction d’orthèse.  L’orthèse est comme une prothèse mise par dessus un membre pour pallier ses faiblesses. Mais mettre une orthèse sur un membre sain, va le faire sous fonctionner. Encombré de cette orthèse le membre se met à moins bien fonctionner. Ainsi l’orthèse se justifie après coup par le sous fonctionnement qu’elle engendre.

Parfois faire le pari de l’engagement, de la loyauté et de la compétence peut être plus économique. Ceci est un autre sujet…

Denis Bismuth

Conférence par Bertrand MARTIN, PDG de New Sulzer Diesel, à l’Ecole de Paris du Management

Séance du 21 avril 1995
Compte rendu rédigé par Lucien Claes

« En 1984, le Groupe Sulzer cherche à sauver sa filiale française la CCM Sulzer dont les pertes s’alourdissent. Le licenciement de 20 % du personnel fait partie des mesures drastiques envisagées.
Le climat social est déprimé. Avant de définir son plan d’action, Bertrand MARTIN, nouveau Président, invite chacun, quel que soit son statut, à exprimer son point de vue. L’espoir renaît…  »

Télécharger le document : New Sulzer Diesel Crise et engagement des hommes Bertrand Martin

Licenciements, délocalisations et baisse du coût du travail sont des remèdes pour améliorer la compétitivité. Les résultats n’étant pas toujours à la hauteur des espérances, n’est-il pas possible d’y associer une autre voie ? Une voie qui ne relève pas du remède miracle, mais de multiples ajustements, basés sur un grand principe : le juste équilibre ! De nombreux exemples montrent, en effet, que le succès survient lorsque l’entreprise est un subtil alliage fait d’un double équilibre : un équilibre économique et un équilibre humain.

L’entreprise, un équilibre économique

Dans de nombreuses entreprises, il semble naturel de pousser au maximum l’utilisation des ressources disponibles, que ce soient des machines ou des employés. L’idée sous-jacente est qu’en maximisant l’utilisation des ressources, on diminue automatiquement les coûts de production ou de service. Passée une certaine limite, cette approche devient rapidement contre-productive.

Prenons l’exemple d’une boulangerie : constatant que le personnel de caisse passe seulement 70 % de son temps à servir les clients, et 30 % du temps restant à attendre qu’un client arrive, nous décidons de licencier l’un des employés afin de reporter sa charge de travail sur les autres et d’accroître les profits. Quel résultat obtiendrons-nous immanquablement aux heures de pointe ? Une file d’attente et des erreurs commises par les employés débordés. Les clients, devenus mécontents, iront à la concurrence et donneront une mauvaise image de l’entreprise. Un coût total qui sera probablement bien plus important que l’économie d’un employé.

Un équilibre doit être trouvé entre le coût des ressources et les coûts induits par l’utilisation excessive de ces mêmes ressources [1]. Parmi ces coûts induits, celui du stress professionnel en France est estimé par le B.I.T. [2] entre 3 et 4 % du PIB.

L’entreprise, un équilibre humain

La performance chez l’être humain passe par la connaissance d’un point d’équilibre

Si on revient à la physiologie, on se rend compte que la plupart de nos fonctions peuvent tendre vers un optimal, mais si on dépasse ce point, les capacités s’effondrent. Ainsi, si on augmente la fréquence cardiaque d’un individu, son débit sanguin va augmenter jusqu’à une certaine fréquence. Si on dépasse cette fréquence, le débit sanguin va s’effondrer et le patient se retrouvera en insuffisance cardiaque.

Si ce juste équilibre existe au niveau de l’humain, il doit être reflété dans son travail

Si l’on se réfère aux travaux de Mihály Csíkszentmihályi, l’état de flow qui correspond à un état de concentration optimale, s’obtient si l’on fixe des objectifs juste au-dessus des compétences du collaborateur. Si l’on fixe l’objectif trop haut, le collaborateur est victime de stress et la performance chute. Si l’on établit le niveau de l’objectif en dessous des compétences du collaborateur, celui-ci s’ennuie et ne connaît ni bien-être, ni performance.

Comment pratiquer ces équilibres en entreprise ?

Concentrez votre effort sur la réduction des files d’attente

Plutôt que de réduire les coûts par la diminution des effectifs, préférez la suppression des coûts cachés dans les files d’attente. Veillez à anticiper les fluctuations naturelles de la demande pour éviter le cercle vicieux de la réduction d’effectif qui fait perdre des clients et qui exige une nouvelle réduction. Enfin, regardez toutes vos files d’attente, aussi bien la pile de dossiers en attente, les tâches commencées, mais non terminées, les emails non lus ou l’accumulation de propositions dans une boîte à idées.

Sur ces principes, Toyota cherche continuellement à se rapprocher d’une production en flux : “produire ce qui est nécessaire, quand cela est nécessaire et pour la quantité nécessaire” [3] ; Corbis, sous le leadership de David J. Anderson, “a limité la quantité de travail en cours des équipes [informatiques] et a favorisé la création d’un flux continu de valeur pour le client” [4].

Assurez-vous que le management crée les conditions de la réussite des employés

L’aventure humaine d’une entreprise exige de respecter les équilibres des employés. Est-ce que les équilibres plaisir/stress, objectif/compétence, liberté/contrainte sont respectés dans votre organisation ? Ne sous-estimez pas les coûts cachés d’un excès de contrôle et d’un repli de la motivation. Supprimez les règles inutiles, faites simple, prenez soin des employés, trouvez, au-delà du profit, votre rêve qui guide cette aventure humaine.

Sur ces bases, HCL Technologies place “Les employés d’abord, les clients ensuite” [5] ; FAVI considère que l’homme est bon [6] et cherche la performance par le bonheur de chacun [7] ; Microsoft et Green Cargo ont mis en place le principe du flow [8].

Mais l’un ne va pas sans l’autre !!!

Le point d’attention peut être différent, mais les deux approches ne sont pas pour autant séparables. FAVI respecte les délais à n’importe quel coût [9]. David J. Anderson cherche à créer les conditions de la réussite des employés [10]. Toyota cultive le respect de ses employés et de ses clients. L’équilibre humain soutient l’efficacité économique et un travail quotidien adapté aux files d’attente naturelles favorise le succès de chacun. Les équilibres économiques et humains sont imbriqués l’un à l’autre.

Repenser l’entreprise dans ses fondamentaux

“On est en fin de course du capitalisme basé sur la consommation de biens domestiques. Ce n’est pas une crise, c’est une rupture. Ceux qui resteront dans le contrôle, la gestion par les chiffres et les structures pléthoriques ne survivront pas”, déclarait Jean-François Zobrist en 2011 [11]. Face à la concurrence mondiale, il est encore temps de repenser l’entreprise dans ses fondamentaux. Pour cela, nous disposons toujours de nombreux atouts : une main d’œuvre de qualité mondialement réputée, de prestigieuses écoles et une tradition de l’excellence. Ces spécificités, alliées à la recherche des équilibres économiques et humains, constituent nos meilleures armes pour créer un choc de compétitivité vital.

Les auteurs

Philippe Rodet, Bruno Chassagne, Alexis Nicolas.

Alexis Nicolas – blog YisY – transformer l’incertain en succès : http://yisy.wordpress.com/2013/02/03/choc-de-competitivite-vers-une-autre-voie/

Plus de performance …

Hier, premier Matin des EDC (Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens) d’une série de 5 sur le thème de « la compétitivité », animé par Pierre-Yves Gomez professeur en stratégie à l’EM Lyon, Chercheur associé à la London Business School, dirigeant de l’Institut de Gouvernance de l‘Entreprise, président de la Société Française de Management, fondateur des parcours Zachée et du GRACE (groupe de recherche sur le don et la gratuité en entreprise)…et auteur de plusieurs ouvrages dont « La Gouvernance des Entreprises ».

Dès l’ouverture, on apprend que la compétitivité, terme à la mode et employé à toutes les sauces, en particulier par les politiques, est un terme confus et complexe tant il recouvre d’éléments distincts. Comme ce premier Matin des EDC était destiné à éclairer notre lanterne, nous avons eu droit à un cours d’économie sur la compétitivité…ma foi fort instructif. Je vous laisse juger de son intérêt et de sa pertinence avec l’objet de l’association MOM21. Je rappelle notre accroche : pour que compétitivité rime avec bien-être au travail.

La définition de l’INSEE qui fait référence en matière économique dit « la compétitivité est l’ensemble des éléments économiques et sociaux qui permettent de soutenir la compétition réelle ou potentielle ». Il s’agit bien de développer la capacité à soutenir la compétition.

L’ensemble de ces éléments peut se résumer dans un tableau à 4 entrées :

Entreprise

Pays

QUALITÉ
– L’innovation – L’adaptation- Le savoir-faire – Le système éducatif- Le marketing du pays*
PRIX – Quantité produite – Productivité – Valeur de la monnaie
COÛTS – Coût relatif des ressources- Coûts salariaux- Localisation et coût des loyers – Politique fiscale et sociale- Infrastructures et logistique
HORS COÛTS – Eléments de flexibilité (dépend de la qualité du dialogue social) – L’organisation des normes – La confiance

*capacité à ancrer une image forte du pays en matière de biens et de services

On constate que le coût du travail, régulièrement brandi par des chefs d’entreprise et des politiques pour expliquer le manque de compétitivité français, n’est qu’une petite partie de celle-ci et que d’autres éléments sont essentiels comme la qualité du dialogue social et l’articulation pays-entreprises.

La compétitivité ne peut donc se résumer à un ratio ni à une compétition entre pays dans laquelle le moins cher gagne. L’Allemagne nous le prouve avec un marketing pays fort (Allemand = qualité et fiabilité) et un dialogue social institué de longue date et entretenu.

Sortons de la version « défensive » de la compétitivité (le moins disant coût conduisant au moins disant social) pour enfourcher une version plus « offensive » : qu’est-ce que la France et les entreprises françaises apportent de spécifique et de plus au monde ? Des réponses existent autour du luxe et des grandes technologies mais elles bénéficient majoritairement aux majors (64 entreprises réalisent 50% du chiffre d’affaires en France).

Plutôt que se demander comment courir toujours plus vite – Alice au pays de la reine de Cœur de Lewis Carroll – mieux vaudrait se demander « Où court-on ? ».

Dans les entreprises libérées chaque salarié sait où il court et pourquoi il y court. La confiance est le moteur de l’action et le principe de subsidiarité le mode de management dominant : principe selon lequel une décision doit être prise par le niveau directement concernée (et non pas au niveau supérieur).

Ce sera l’objet d’un prochain post….

Tohu

Bernard Rohmer

Vers la libération d’entreprise

Neuf mois après sa prise de fonction comme directeur général de FAVI, Jean-François Zobrist se heurte à la résistance de son encadrement sur ses projets de « libération » des salariés. Il a donc décidé de s’adresser directement au personnel à l’occasion de son discours de Noël. Je vous laisse savourer :

Ça fait neuf mois que je suis parmi vous… neuf mois que je vous regarde, et que je vois des gens courageux, de grands professionnels qui aiment leur métier, mais qu’on empêche de bien travailler. J’en suis arrivé à la conclusion que des gens comme vous, qui ont des qualités, n’ont plus besoin de carotte, ni de bâton d’ailleurs.

La carotte et le bâton sont indignes de professionnels comme vous. C’est pourquoi quand vous reprendrez le travail en janvier, les pointeuses seront démontées. Il n’y aura plus de pointage, vous n’êtes pas payés pour faire des heures mais des pièces, et des pièces bonnes. C’est pourquoi les sonneries seront aussi supprimées. Il n’y aura plus de primes non plus, nous prendrons la moyenne des primes que chacun a reçues au cours des deux dernières années et nous l’ajouterons au salaire.

Il n’y a pas de voleurs parmi nous, c’est pourquoi la porte du magasin sera démontée. On va mettre quelque part un panneau et un marqueur, et chacun indiquera non pas son nom, car cela n’est d’aucune utilité, mais ce qu’il a pris, de façon à pouvoir lancer les commandes de réassort.

Il n’y aura plus non plus de distributeurs de boissons payantes, mais dans chaque atelier deux distributeurs d’eau fraîche avec des sirops, et d’eau chaude avec des dosettes de café et de sucre.

Nous allons supprimer les clés à molette et doter chaque machine d’un lot d’outillage, et de plus, pour que chacun puisse s’équiper comme il l’entend, tous les salariés de l’entreprise vont disposer d’un chèque de 500 francs pour acheter ce que bon leur semble, du moment que cela a un rapport avec le travail.

Il n’y aura plus jamais de chômage partiel. Si un jour nous sommes obligés de recourir à de telles mesures, alors je mettrai d’abord les cadres au chômage, même moi. Il n’y aura plus jamais non plus de repas de cadres : nous mangerons tous ensemble ou nous ne mangerons pas.

Se tournant vers les cadres : comment allons-nous faire pour fonctionner à l’avenir ? A vrai dire, je ne sais pas. Je suis certain que vous méritez que nous fonctionnions autrement, mais je n’ai pas de modèle de remplacement. Je propose que, tous ensemble, nous faisions « en allant », en gens de bonne foi, de bon sens et de bonne volonté.

Ensuite Jean-François a tenu sa première réunion d’encadrement et leur annonçant aussi que c’était le dernière, et que leur rôle traditionnel de contrôle était du passé et que désormais ils guideraient, aideraient et animeraient les opérateurs jusqu’à ce qu’ils puissent être autonomes et mesurer eux-mêmes leurs résultats. Il appliquait là les principes de Jean-Christian Fauvet en mettant en place une gestion « par les hommes » et non pas « par les procédures ». La plupart des cadres se sont reconvertis dans les activités de recherche et de développement, ou dans la mise au point de méthodes d’amélioration continue.
Tohu

Changer de modèle managérial ?

De Boltanski à Clot et de Dejours à Suppiot, les chercheurs nous annoncent un changement de modèle entrepreneurial déjà en marche.

Il a sans doute atteint sa limite le vieux modèle qui place l’individualisme et la compétition au centre de l’économie, où le contrôle par la hiérarchie, la gestion et la finance ont pris le dessus sur la responsabilité, l’expertise métier et les relations au travail. Et le modèle devient contre-productif alors même qu’il était censé renforcer la productivité, la qualité et le travail en équipe. Quels que soient les rafistolages et les replâtrages que nous proposent les projets et propositions qui s’affrontent sur la scène de théâtre de la comédie politique, seul un changement de modèle entrepreneurial pourra nous permettre de dépasser la limite de notre enfermement économique. Lire la suite

Partant de principes simples :

  • La performance vient essentiellement des ouvriers / il n’y a pas de performance sans bonheur / pour être heureux il faut être responsable / pour être responsable il faut être totalement autonome. / pour être autonome il faut être libre de s’auto-organiser
  • Le diable est dans les cloisons / les cloisons empêchent l’autonomie. Lire la suite